6.4.06

Manifeste



" Mon abécédaire : A B C D etc... Lorsque je m’adresse à moi, ABCD suffit. Etc...c’est pour les autres. Lorsque je note sur un bout de papier une idée de roman, je me comprends. L’intention seule est fixée. Pour que le roman existe, il ne reste qu’à l’écrire, qu’à travailler. Je m’y attaquerai donc un jour, si j’ai besoin d’argent. Pour l’instant, l’idée me suffit. Mais une idée est dure à vendre. Ce que les clients achètent, c’est le travail."
(...)
Avec le travail, l’encombrement. Il faut valoriser ce que l’on vend aux autres. Gros livres, volumes obèses, albums de plusieurs kilos, films de cinq heures, gigantisme, mégalomanie, romans-fleuves, tours de la Défense. À coup sûr, l’art ne gagne pas à la traduction. En revanche, 'l’artiste' si. Et d’abord une situation sociale, même si elle n’est pas toujours enviable. En tout cas, c’est le savoir-faire qui est apprécié du public, pas l’intention. Le style, ah, le style ! Quel travail ! Et pourtant, l’idée toute seule, de moi à moi, elle avait déjà sa forme, déjà son style. Il n’y a rien qui ne soit pas incarné dans ce bas monde. Oh, bien sûr, c’était petit, humble, mal dessiné, avec des fautes de français, d’orthographe, des erreurs de proportions, c’était illisible, mais ça y était ! En tout cas pour moi c’était suffisant ! Ce n’était pas de l’art à vendre. Ce n’était pas de l’art avec du travail. C’était de la création, l’éclair de la création pour tout de suite, et le travail pour plus tard..."

De Manifeste de L’Auto-École, par Roland Topor.

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